TRAVEL DIARIES • 2010 • CARNETS DE VOYAGE

16 years ago, the smallest country of the Great-Lakes region was hit by a genocide. 4 friends interested in African politics have decided to take a closer look at the Renaissance of the Rwandan society.

Il y a 16 ans, le plus petit pays de la région des Grands-Lacs était touché par un génocide dévastateur. 4 amis passionnés de politique africaine ont décidé de s'intéresser de près à la Renaissance de la société Rwandaise.

jeudi 8 juillet 2010

L'Eglise: Coupable ou gênante?

La population catholique et protestante historiquement très majoritaire au Rwanda lui valut la réputation d’être le pays le plus chrétien d’Afrique. Le christianisme apparut au début du XXème siècle et se développa graduellement pendant les premières missions des Pères Blancs et s’amplifia suite à la connivence de ces derniers avec l’administration coloniale. De fil en aiguille, les missions formèrent des communautés parroissiales qui devinrent une institution hiérarchisée très active dans la société rwandaise jusqu’à en devenir fondamentale. En 1934, le Roi Mutara III devient le premier Roi de la dynastie Tutsi à se convertir au catholicisme déclenchant ainsi une série de conversions en masse sous les bons augures du pouvoir colonial. L’élite tutsi, première à avoir reçu une éducation dispensée par l’Eglise, composait le clergé rwandais. Ce n’est que vers 1950 que la fonction cléricale s’ouvre au reste de la pyramide sociale d’où est issue la grande majorité des Hutus. Cette démocratisation coïncide avec un revirement de la réthorique officielle de l’Eglise vers un discours plus populaire. C’est sans étonnement que l’on apprend que l’Eglise eut un rôle actif dans les événements précédant la révolution sociale Hutu de 1959. Grégoire Kayibanda, le premier à créer un parti politique hutu, n’était nul autre que l’assistant personnel du vicaire apostolique, Monseigneur Perrodin. L’Eglise, colonne vertébrale de la société rwandaise, manifeste son soutien au mouvement social (plus proche de la vision de justice sociale catholique).Malgré de nombreux abus envers les Tutsis, Grégoire Kayibanda entretiendra de bonnes relations avec l’institution catholique et deviendra même le premier président du Rwanda indépendant en 1961.

En 1994, l’Eglise se paralyse et reste anesthésiée par la violence. La passivité de l’Eglise est dénoncée par certains prêtres eux-mêmes, alors que la furie assassine qui hante le Pays des Mille Collines pendant ces 100 jours de 1994 atteint également les cercles religieux. Des chrétiens tuent des chrétiens. Des prêtres et pasteurs tuent leurs paroissiens. Hélas, l’obscénité de l’horreur ne s’arrête pas là : dans ce contexte chaotique, le massacre n’épargne personne et arrive jusqu’à franchir le seuil sacré de l’église et du temple, qui furent le lieu où périrent plus de 80 000 victimes du génocide.
L’église, ébranlée depuis 1994, peine à se reconstruire dans un climat social et politique avide de renouveau. Malgré le fait que de nombreux prêtres sacrifièrent leur vie pendant le génocide, l’image de l’Eglise reste mitigée dans la rue, à l’heure où certains membres du clergé sont poursuivis par des mandats d’arrêt internationaux, même 16 ans plus tard. En surenchère de cette énorme perte d’influence, le Front Patriotique Rwandais (FPR) ) au pouvoir depuis 1994 a misé sur d’autres partenaires sociaux pour la reconstruction du pays. L’Eglise, au-delà de sa contribution à la richesse culturelle du pays traîne aussi derrière elle une histoire politique qui a par moments exacerbé les tensions ethniques en favorisant l’ethnie tutsie en début de siècle, puis en se rangeant du côté de la révolution sociale hutue de 1959. Le clergé a pour l’instant une place inconfortable dans l’agenda politique de Kigali, qui souhaite s’assurer le monopole de la réconciliation nationale.

Une partie de la population, désireuse de tourner la page, a trouvé d’autres courants religieux. A l’exemple du Kenya voisin, les églises adventistes et anglicanes connaissent un succès croissant face à un régime rwandais, allié de Washington, plus laxiste envers les églises anglo-saxonnes. On notera également une montée non négligeable de l’Islam, religion présente depuis le siècle dernier, et quelque peu épargnée par l’histoire difficile du conflit ethnique.


Louis-Guillaume

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